Texte de l'interview à télécharger "Le Honduras est isolé internationalement".
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source: http://www.cgis-ameriques.com/
Résumé:
Ceux qui ont renversé Manuel Zelaya s’attendaient à un soutien des Etats‐Unis qu’ils n’ont
pas reçu, assure M. Alain Musset, Directeur d’études à l’EHESS et membre du Conseil
scientifique de l’Institut des Amériques, actuellement dans la région.
‐ Le renversement de M. Manuel Zelaya était‐il prévisible ? Comment en est‐on arrivé à
l’arrestation du président et son expulsion du pays ?
Le coup, tel quel, était difficilement prévisible. Mais on a vu au fil des années un
glissement de la position du président Zelaya vers le « bloc du refus », incarné par Hugo
Chavez au Venezuela. Le président hondurien, déjà marginalisé au sein de son propre
parti, a choisi de se rapprocher de l'ALBA (Alternative bolivarienne pour les Amériques),
institution créée par Chavez pour contrer les politiques néolibérales des Etats‐Unis dans
l'hémisphère occidental, malgré l'opposition des classes dirigeantes traditionnelles et de
l'ensemble de la classe politique.
Sa tentative de lancer un referendum, camouflé en consultation populaire, pour légitimer
son action et peut‐être préparer une modification de la constitution, afin de lui permettre
de briguer un second mandat (ce qui est interdit par la constitution actuelle), a précipité
les événements. En s'opposant directement à l'armée (par la mise à l'écart du général chef
de l'état‐major), il a concrétisé le désaccord latent qui existait entre sa vision géopolitique
et le point de vue traditionnel d'une institution connue pour être placée à la droite de
l'échiquier politique national.
‐ Doit‐on parler de coup d'Etat militaire?
A proprement parler, il ne s'agit pas d'un coup d'état militaire, puisque l'armée n'a pas
directement renversé le président constitutionnel. Les militaires ont agi à la demande des
autorités politiques (en particulier la chambre des députés), qui considéraient le
referendum de Zelaya comme anti‐constitutionnel. Les fonctionnaires chargés d'assurer la
bonne tenue du scrutin ont même été menacés de révocation. C'est à l'unanimité que les
députés ont choisi le nouveau président, censé occuper le poste jusqu'à la date prévue
pour les prochaines élections. Cependant, le rôle joué par l'état‐major a été décisif et on
peut penser que dans un pays qui a longtemps été dirigé par des juntes militaires, la
destitution a été orchestrée par les généraux. Le pays a été placé sous couvre‐feu pour au
moins une journée, avec contrôle des rues par les soldats. Les institutions publiques et les
écoles sont fermées pour plusieurs jours afin d'éviter les rassemblements suspects.
Contrairement à ce qu'espéraient les "conjurés", pour reprendre l'expression du président
déchu, réfugié au Nicaragua, le coup d'état n'a pas reçu le soutien des Etats‐Unis, à
l'inverse de ce qui s'était produit il y a quelques années au Venezuela avec le « golpe »
avorté contre Hugo Chavez en 2002. Mais il faut dire que le contexte géopolitique a
changé. Ce n'est plus George W. Bush mais Barack Obama qui occupe la Maison Blanche.
En outre, le Honduras n'est plus un pays stratégique pour les experts du Pentagone,
contrairement a ce qu'il était au cours des années 1980 durant la guerre contre les
sandinistes au Nicaragua.
L'Organisation des Etats américains (OAS) a condamné de manière unanime le coup
d'état et le nouveau régime se retrouve complètement isolé, même s'il a essayé de
démontrer que le processus était parfaitement constitutionnel, en s'appuyant sur une
lettre de démission rédigée par Zelaya ‐ lettre que celui‐ci a déclaré n'avoir jamais écrite.
Même les menaces non voilées de Chavez, qui a déclaré avoir mis son armée en alerte, ne
réussiront pas à entraîner le clan conservateur nord‐américain du côté des putschistes. Car
on peut supposer que le Venezuela en restera au niveau des gesticulations. A l'intérieur du
pays, le processus semble avoir reçu l'approbation des classes moyennes et supérieures,
effrayées par le spectre du socialisme du XXIe siècle prôné par le leader vénézuélien. Les
classes populaires ne se sont pas encore manifestées, mais il faut dire que Zelaya n'a ni le
charisme de Chavez ni le support d'une histoire glorieuse, comme peut l'avoir Daniel
Ortega au Nicaragua, héritier de la révolution sandiniste qui a mis fin à la dictature de la
famille Somoza le 19 juillet 1979.
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Résumé:
Ceux qui ont renversé Manuel Zelaya s’attendaient à un soutien des Etats‐Unis qu’ils n’ont
pas reçu, assure M. Alain Musset, Directeur d’études à l’EHESS et membre du Conseil
scientifique de l’Institut des Amériques, actuellement dans la région.
‐ Le renversement de M. Manuel Zelaya était‐il prévisible ? Comment en est‐on arrivé à
l’arrestation du président et son expulsion du pays ?
Le coup, tel quel, était difficilement prévisible. Mais on a vu au fil des années un
glissement de la position du président Zelaya vers le « bloc du refus », incarné par Hugo
Chavez au Venezuela. Le président hondurien, déjà marginalisé au sein de son propre
parti, a choisi de se rapprocher de l'ALBA (Alternative bolivarienne pour les Amériques),
institution créée par Chavez pour contrer les politiques néolibérales des Etats‐Unis dans
l'hémisphère occidental, malgré l'opposition des classes dirigeantes traditionnelles et de
l'ensemble de la classe politique.
Sa tentative de lancer un referendum, camouflé en consultation populaire, pour légitimer
son action et peut‐être préparer une modification de la constitution, afin de lui permettre
de briguer un second mandat (ce qui est interdit par la constitution actuelle), a précipité
les événements. En s'opposant directement à l'armée (par la mise à l'écart du général chef
de l'état‐major), il a concrétisé le désaccord latent qui existait entre sa vision géopolitique
et le point de vue traditionnel d'une institution connue pour être placée à la droite de
l'échiquier politique national.
‐ Doit‐on parler de coup d'Etat militaire?
A proprement parler, il ne s'agit pas d'un coup d'état militaire, puisque l'armée n'a pas
directement renversé le président constitutionnel. Les militaires ont agi à la demande des
autorités politiques (en particulier la chambre des députés), qui considéraient le
referendum de Zelaya comme anti‐constitutionnel. Les fonctionnaires chargés d'assurer la
bonne tenue du scrutin ont même été menacés de révocation. C'est à l'unanimité que les
députés ont choisi le nouveau président, censé occuper le poste jusqu'à la date prévue
pour les prochaines élections. Cependant, le rôle joué par l'état‐major a été décisif et on
peut penser que dans un pays qui a longtemps été dirigé par des juntes militaires, la
destitution a été orchestrée par les généraux. Le pays a été placé sous couvre‐feu pour au
moins une journée, avec contrôle des rues par les soldats. Les institutions publiques et les
écoles sont fermées pour plusieurs jours afin d'éviter les rassemblements suspects.
Contrairement à ce qu'espéraient les "conjurés", pour reprendre l'expression du président
déchu, réfugié au Nicaragua, le coup d'état n'a pas reçu le soutien des Etats‐Unis, à
l'inverse de ce qui s'était produit il y a quelques années au Venezuela avec le « golpe »
avorté contre Hugo Chavez en 2002. Mais il faut dire que le contexte géopolitique a
changé. Ce n'est plus George W. Bush mais Barack Obama qui occupe la Maison Blanche.
En outre, le Honduras n'est plus un pays stratégique pour les experts du Pentagone,
contrairement a ce qu'il était au cours des années 1980 durant la guerre contre les
sandinistes au Nicaragua.
L'Organisation des Etats américains (OAS) a condamné de manière unanime le coup
d'état et le nouveau régime se retrouve complètement isolé, même s'il a essayé de
démontrer que le processus était parfaitement constitutionnel, en s'appuyant sur une
lettre de démission rédigée par Zelaya ‐ lettre que celui‐ci a déclaré n'avoir jamais écrite.
Même les menaces non voilées de Chavez, qui a déclaré avoir mis son armée en alerte, ne
réussiront pas à entraîner le clan conservateur nord‐américain du côté des putschistes. Car
on peut supposer que le Venezuela en restera au niveau des gesticulations. A l'intérieur du
pays, le processus semble avoir reçu l'approbation des classes moyennes et supérieures,
effrayées par le spectre du socialisme du XXIe siècle prôné par le leader vénézuélien. Les
classes populaires ne se sont pas encore manifestées, mais il faut dire que Zelaya n'a ni le
charisme de Chavez ni le support d'une histoire glorieuse, comme peut l'avoir Daniel
Ortega au Nicaragua, héritier de la révolution sandiniste qui a mis fin à la dictature de la
famille Somoza le 19 juillet 1979.